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PASSUGGER HISTOIRES | № 4

Cuisinière du mardi

  • Texte: Oliver Kerstholt
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  • Fotos: Nicola Pitaro

Tout commence avec des œufs et de la farine. C’est sur la base de ces deux ingrédients que Patrizia ouvre chaque semaine les portes de son univers de pâtes italiennes fraîches à l’équipe Passugger. Son engagement est l’expression de l’estime dont fait preuve Allegra Passugger à l’égard de son équipe. Tous les mardis, lorsque le restaurant voisin Mühle a son jour de fermeture hebdomadaire, Patrizia vient cuisiner pour toutes les collaboratrices et collaborateurs à la demande de la direction.

Quand elle arrive à 9h30 dans la cantine de l’usine Passugger, le calme règne encore. Selon la saison, la lumière du jour se pose sur le plan du travail dans la cuisine ou bien sur la grande table encore vide qui accueillera plus tard le repas. Sa journée démarre toujours de la même manière: elle pose les sacs en tissus remplis des achats avant de les sortir. Œufs frais de la ferme, salades, légumes – aujourd’hui, il y a des petites courgettes, des radis, du céleri et des carottes – bœuf, vin rouge, crème, gousses de vanille et quelques ingrédients dont Patrizia souhaite garder le secret. Cuisiner «a la casalinga» a bien sûr sa part de mystère. Les ingrédients de base comme la farine, les oignons, l’ail ou encore les épices et l’huile d’olive ne manquent jamais à l’appel dans la cuisine. Un lieu par ailleurs volontiers utilisé les autres jours de la semaine par l’équipe Passugger.

Première étape, la sauce. Ou plus précisément: le «ragù». Et pour être tout à fait exact: un classique «ragù alla bolognese». Très vite, la cantine toute de noir vêtue est emplie de ce parfum unique que nous connaissons de la cuisine italienne, et auquel nous succombons bien avant que le repas soit servi. Mais il va falloir encore patienter: le temps est l’un des ingrédients les plus importants pour un repas réussi, juge Patrizia. Vient alors le tour des pâtes. Dans un grand saladier, elle mélange la farine et les œufs, ajoute avec un regard prometteur du sel tout en incluant à intervalles réguliers une petite quantité d’eau. Ce qui se déroule sous nos yeux lors des prochaines 15 minutes est toujours aussi surprenant, bien que nous sachions ce qui va se passer. La force et dans le même temps l’élégance avec laquelle Patrizia se consacre au pétrissage de la pâte tient presque du rituel dont l’art semble pour toujours inaccessible à l’observateur. Une scène soulignée par la lumière du soleil dans laquelle flotte la farine, comme si Baz Luhrmann en était le metteur en scène.

«Bravo!» est-on tenté de lancer lorsque l’on assiste à ce spectacle. Et l’on comprend le bonheur diffusé par un art gastronomique classique et éprouvé depuis des décennies, nourri par la puissance des arômes doux qui s’échappent de l’immense casserole contenant le ragù.

Objectivement parlant, on sait qu’une telle expression sentimentale du ravissement ne devrait pas avoir sa place ici. Mais plus tard, lorsque les convives noient la cuisinière du mardi sous les compliments, c’est alors le moment où sa passion pour la cuisine est reconnue à sa juste valeur.

Après que la pâte a bien reposé, elle est roulée morceau par morceau, puis décollée du plan de travail enfariné jusqu’à ce qu’elle soit translucide. Puis Patrizia la coupe en de longues bandes de deux centimètres de large pour former des «papardelle». Les pâtes parfaites pour son ragù, dit-elle, et demande si nous savions que le mot italien «pappare» signifie à peu près «engloutir». Nous aurions au moins pu le deviner.

Lorsque, peu avant midi, l’équipe affamée de Passugger arrive, les salades attendent déjà sur les tables. Préparés avec le même amour par Patrizia, des rondelles de radis rouges et blancs et de petites courgettes blanches et vertes ont été mariées aux croquantes feuilles vertes de roquette.

Le moment fort reste cependant, comme chaque mardi, lorsque Patrizia sert ses pâtes faites maison. On pourrait jurer avoir entendu crier «bravo!» avant l’arrivée du premier plat sur la table.

Et nous pouvons ici dévoiler un petit secret: chaque semaine, Patrizia sert également un dessert bien qu’elle soit engagée «seulement» pour un menu avec entrée et plat principal. «Un bon repas se doit d’être conclu par une note sucrée» confirme-t-elle. Le travail supplémentaire pour préparer une panna cotta, comme c’est le cas aujourd’hui, ne vaut même pas la peine d’être mentionné d’après elle.